Formation BAFA : Quel organisme de formation choisir ?

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Dans la série « Je commence à avoir des phrases de vieux cons », je me suis surpris à aborder dans mes discussions et mes réflexions, le thème des organismes de formation avec une approche de vieux schnock.

Je voyais autour de moi des animateurs/directeurs qui partaient se former pour tel ou tel organisme de formation, soit au pif, soit parce que la date où le lieu de la session leur convenait, soit par habitude, soit parce que on leur avait dit « va la bas ».

« A mon époque, on choisissait son organisme de formation pour ses valeurs… », « Les jeunes d’aujourd’hui, eux… », « y’a plus de politique, ni de valeurs… »

Stop ! A m’entendre dire ou penser de cette façon, je me suis posé la question : Est-ce bien vrai ?

Quand à 17 ans je me suis inscrit en formation Base BAFA, avais-je vraiment choisi l’organisme sur ses valeurs ? Avais-je une quelconque idée de l’historique de création des différents organismes de formation ? Avais-je conscience des différentes valeurs de ceux-ci ? Savais-je seulement ce qu’étaient des « Valeurs » ?

Et bien non. Non, non. A 17 ans, j’ai un peu choisi au pif… je ne connaissais pas 1/10ieme des organismes de formation. Je n’avais aucune culture/connaissances de l’histoire de l’éducation populaire. Et pour tout dire je n’en avais rien à
secouer en fait… Soyons honnête
.

De plus, c’était le tout début d’internet… les catalogues/brochures de formation étaient en version papier. On s’inscrivait auprès d’un organisme dont on avait trouvé la brochure je ne sais où, ou tout simplement parce qu’on avait en tête 1 ou 2 noms d’organisme… pour ma part, parce que dans ma famille on avait dû prononcer ces noms d’organisme plus que d’autres.

Ce n’est qu’une fois en formation, où j’ai apprécié le tout premier temps de la formation : présentation de l’organisme, son histoire, ses valeurs. J’ai découvert pour la première fois l’historique des colos, des « monos », des organismes. J’ai découvert mais surtout j’ai aimé découvrir du sens. Ceux qui avaient créé les colos l’avaient fait avec des Idées en tête… ils voyaient ça comme « un moyen de », pas une fin en soi. Et puis j’ai découvert le mot « Valeurs »… pour la toute première fois de ma vie, ce mot « placard » se remplissait de sens.

J’ai eut de la chance car les « valeurs » de cet organisme ont résonnées en moi. Je n’avais jamais pensé en ces termes, ni réfléchi à mes propres valeurs, ni même réalisé que nos actions tout comme celles des autres procédaient ou s’incluaient dans la mise en pratique, dans la réalisation, de « valeurs ».
J’aurais pu choisir au pif un autre organisme de formation. M’aurait-il présenté également l’historique des colos et des mouvements d’éducation populaire ? M’aurait-il présenté l’histoire « politique » ou « sociale » de ces mouvements ? Aurait-il prit du temps pour donner du sens aux « valeurs » ? M’aurait-il clairement présenté ses valeurs ? Aurais-je été en phase avec celles-ci ? Aurais adhéré à ses valeurs si elles n’avaient pas été les miennes profondes ?

Je ne peux pas y répondre.


Cependant je me souviens très bien qu’à 17 ans à peine, l’approche historique, sociale, politique des colo et de l’éducation populaire au sens large a été une vrai révélation pour moi. Je ne sais pas si ce fut le même vécu pour les autres jeunes autour de moi. Chacun à sa sensibilité et chacun est sensible à certaines choses à certain moment de sa vie. Je crois que je suis tombé au bon endroit, au bon moment et surtout avec les bons formateurs.


Parlant des organismes de formation, la « vieux con attitude » veut :

  1. Qu’on dise que notre organisme préféré est le mieux de tous.

Corrolaires : chez les autres c’est moins bien, les contenus sont nuls, les formateurs nazes, la forme stupide et les valeurs scandaleusement cachées.

2.  Qu’on ai pas un regard critique sur notre organisme préféré.

Alors comme j’avais peur de passer pour un vieux con, j’ai voulu faire une recherche approfondie pour :

* Faire la liste de tous les organismes de formation BAFA du pays
* Faire l’historique de ces organismes dans le contexte de l’évolution historique et politique de l’Education Populaire

* Mettre en avant les lignages et les valeurs propres à ces organismes
Une sorte de frise chronologique, arborescente, filiales des organismes et des valeurs. Mais d’autres l’ont fait avant moi pour certains aspects :

LE LISTING
Voici donc un lien vers Planete Anim qui fait la liste des organismes avec le lien vers le site internet de chacun :
http://www.planetanim.com/modules/myorganismes/

Les Valeurs ou en fait plutôt l’Histoire de ces organismes :

l’article rédigé par Saltimbanque

Mais là, j’ai voulu en savoir plus sur les VALEURS de ces organismes, dont j’ignorais tout pour certains. Malheureusement pour tous les organismes, si on a accès facilement à leurs projets, il est difficile de trouver sur leur site, leur histoire explicite et encore plus difficile de trouver les Valeurs Fondamentales qui les animent. J’avais découvert au sein de mon organisme de formation, l’histoire politique de celui-ci. Les « valeurs » sont toujours d’ordre « politique ». L’AFOCAL n’est pas les CEMEA, l’IFAC n’est pas les FRANCAS… Mais je n’ai pas trouvé sur leurs sites écrit noir sur blanc leur valeurs. Leurs « projets » à tous, emploient des mots valises, qui ne fâchent personne, et surtout qui passent outre les valeurs « politiques »… oui le « politique » (j’ai écrit « le », pas « la »), ça fait peur, c’est sale, clivant, caca…

J’ai parlé autour de moi, avec des gens qui ont été formé ou qui sont formateurs pour d’autres organismes… finalement peu avaient connaissance ni de l’histoire politique de l’organisme ni des valeurs politiques de celui-ci… Comme si : la formation des jeunes adultes, l’engagement volontaire auprès d’enfant, l’éducation populaire, tout ceci n’avait rien de politique (au sens noble du terme : « faire des choix de vie pour vivre ensemble d’une certaine façon »). Comme si la formation BAFA et les colos n’avaient plus rien de politique mais seulement commerciale… «On vend des formations », « on vend des colos/du loisir »

J’ai cherché sur le net, j’ai lu… mais je n’ai pas trouvé un magnifique papier, qui ferait de l’histoire sur les organismes de formation, leur valeurs etc…
Ce qui m’a le plus informé sur l’histoire de l’Education Populaire, ce qu’elle était, ce qu’elle est devenue, c’est la conférence gesticulée de Franck Lepage à ce sujet :

http://www.scoplepave.org/l-education-populaire-monsieur-ils-n-en-ont-pas

Du coup, par manque d’informations, par manque de temps, et donc par paresse, je ne ferais pas (encore) ici l’histoire complète des organismes de formation BAFA. Je n’ai pas accumulé assez de matière et j’ai peur aussi de manquer d’objectivité aussi à cause de mes valeurs et convictions personnelles.


En gros, et pour faire le plus court possible :

Les colos, ou l’engagement volontaire envers les enfants (colo, centre, et toute forme d’éduc pop) à un enracinement politique et social fort. Les organismes de formation quels qu’ils soient ont tous et chacun des valeurs fortes, une vision de l’éducation populaire qui lui est propre, un engagement politique fort. Même si il n’est pas affiché à première vue, même si certains s’en défendent.

Il y a des courants Laïcs, des courants religieux qui n’ont pas voulu laisser « la formation de la jeunesse » aux mains des Laïcs, il y a des organismes historiquement ancrés à « Gauche » avec tout le panel, les points communs, mais surtout les oppositions et divergences « politiques » (= de « valeurs ») que l’on retrouve dans toutes les autres organisations politiques. Il y a tout autant d’organismes de formation historiquement ancrés à « à droite », avec des valeurs et oppositions toutes aussi franches que dans toutes autres structures ou organisation politique. Les unes se démarquant des autres par leur projet et leur valeurs aux antipodes les unes des autres, voire, leur histoire ancrées dans la réaction ou l’opposition à des « mouvements » de l’autre bord ; les autres se construisant tout autant dans l’opposition, mais non pas face à « ceux de l’autre bord », mais vis-à-vis de mouvements du « même bord politique », dans un souci de « nous c’est pas eux, on est pas pareil »…

Bref, il faudrait faire de l’histoire, remettre dans le contexte, bien regarder, aller fouiller et tenter d’être objectif… Ce qui ferait vite chier tout le monde, les jeunes animateurs en premier lieu.

Pour ceux qui veulent trouver les informations cachées : ne lisez pas les « projets » ce sont tous les mêmes et tout le « politique » à était balayé pour ne faire peur à personne. Par contre si vous regardez la liste des associations affiliées ou membres alors c’est plus facile de se faire une idée : la « Ligue Révolutionnaire Bretonne, des Bouffeurs de Curés, Anarcho-machin-truc » n’a pas les mêmes valeurs et ne s’affilient pas aux mêmes organisme de formation que « La Ligue de Sauvegarde des Valeurs Bérichonne Traditionnelles, Blanche et Religieuse »… enfin c’est évident quoi. On peut trouver l’info des valeurs en cherchant les membres fondateurs ou les présidences… du genre un organisme créé ou présidé par « Mahatma Gandhi » ne portera pas les mêmes valeurs qu’un organisme crée ou présidée par le « Général Pinochet »…


RETENONS UNE CHOSE :

Oui ! Les organismes de formation ont tous des valeurs politiques propres, historiques, fortes.
Non, tous les organismes de formation ne se valent pas… sur ce volet des valeurs. Attention, ne se « valent pas » sur le plan « des valeurs ». Je ne dis pas que telles valeurs sont mieux que d’autres etc… On est là dans le domaine des valeurs, ce n’est pas à moi d’en discuter ici.

Doit-on choisir son organisme de formation pour ses valeurs ?

Bon courage d’abord pour trouver sur leur site une présentation claires de celles-ci. J’ai cherché pour vous, je n’ai pas trouvé.
Je tenterai de vous dire :

Si vous avez déjà une vision claire de vos propres valeurs, si c’est important pour vous d’avoir du sens dans vos actes et dans votre formation, si vous vous sentez l’âme engagée ou militante ; alors peut-être que oui ça peut être bon de dénicher l’organisme qui milite dans votre sens… Quoique ça peut être riche et constructif pour vous de vous « fritter », avec des gens qui ont des valeurs qui diffèrent un peu des vôtres, voire qui seraient totalement à l’opposé. Comme vous avez déjà des valeurs personnelles, ça vous permettra d’apprendre à les défendre, voire à les remettre en question.

Si pour vous les colos, l’animation, l’éducation populaire n’a pour le moment ou dans l’absolue aucun lien avec des « Valeurs » ou du « Politique », si l’animation, c’est juste un petit boulot sympa. Et bien a priori, j’ai envie de vous dire, choisissez n’importe quel organisme, vous apprendrez des bases de l’animation, si ça se trouve on vous fera pas entrer de valeurs dans la tête, où vous ne verrez même pas qu’on y en a glissé en douce…


Les formation chez tel organisme sont-elles mieux que chez tel autre ?

Nonobstant du coup les valeurs propres à chaque organisme, est-ce qu’il vaut mieux aller ici ou là, pour le contenu et/ou la forme de la formation.

La « Vieux Con Attitude » jaillit alors facilement « Oui tel organisme c’est mieux, ailleurs c’est vraiment… ». Le vieux con n’est pas toujours très objectif.

Objectivement il faut se dire que le contenu et la forme de la formation va dépendre :

  •  Des formateurs de la session
  •  De l’implication des stagiaires
  •  Des attentes individuelles de chacunSi les formateurs sont « nuls » (à chacun de définir ce critère), ils seront « nuls » qu’ils forment chez les uns ou chez les autres. Aucun organisme n’a le privilège de la nullité, ni de l’élitisme (terme à définir) de ses formateurs. J’ai fait toutes mes formations au sein du même organisme. La plupart de mes formateurs, je les ai trouvé, extra-ordinaires. Sauf sur une session, où je les ai trouvé totalement nuls, et pas « digne » (mot de vieux con) de l’organisme.

Si les stagiaires viennent en touristes, la formation va être totalement différente du cas où tout le monde en veut, en redemande, est super actif et au taquet

Si vous êtes le seul anim en formation pour être animateur/directeur de colo et que tous les autres stagiaires viennent se former pour être animateur/directeur de centre aéré, le contenu de la formation va peut etre répondre aux attentes des uns et pas des autres. Idem si certains veulent apprendre par la pratique et que d’autres ont besoin de la théorie. Idem si certains veulent de l’imaginaire 24h/24 et si d’autres veulent un truc super carré, ou « sérieux »…

A RETENIR :

Votre vécu de la formation ne dépend pas de l’acronyme de l’organisme. Ni même seulement des formateur de la session. Ni même uniquement de l’implication des stagiaires, mais aussi de vous individuellement.


CONCLUSION (tentée objective et pas de vieux con)

Les organismes de formation ont une histoire qui leur est propre. Cette histoire est politique. Chacune a ses valeurs propres, qui sont des valeurs fortes et fondamentale : on ne forme pas des jeunes adultes pour rien, on ne forme pas des jeunes adultes qui vont être en présence d’enfant pour rien. Le fond comme la forme de la formation, des idées, des jeux, des fonctionnements mis en place ne sont pas dépouillées de ces valeurs.
Rassurez-vous cependant, une formation BAFA n’est pas un enrôlement politique… sachez juste que ces valeurs existes, qu’elles difusent dans la pratique des formants comme des formés. Vous pouvez choisir votre organisme en recherchant des valeurs qui vous sont propres comme tenter de fuir celles qui vous repoussent
Les formateurs sont des individus. Leur façon d’être comme leur façon de faire leur sont propres. Tous ont leur niveau de compétences et d’expérience. Pour ce qui est des valeurs, certains forment très bien à l’animation (comme très mal), sans avoir une once de Valeur (Politique), voire même forme au sein d’organisme qui ont des Valeurs qui ne sont pas les leurs (sans connaître ni se soucier des valeurs de l’organisme). Au sein d’un même organisme, vous trouverez des formateurs au top et d’autre moins.

Si vous êtes passifs en formation, que vous restez sur votre chaise sans poser des questions, participer, demander, échanger, questionner… n’espérez pas que ça tombe du ciel. Ce n’est pas l’ « Ecole Unique et Officielle de l’Animation », avec une leçon à apprendre et des recettes à appliquer.

Vos attentes sont les vôtres, et pas forcément celles de vos voisins. Si vous ne les formulez pas, il ne faut reprocher aux autres (aux formateurs, ou autres stagiaires) de ne pas avoir entendu ce que vous ne leur avez pas dit.


CONSEILS

1. En formation BAFA/BAFD on y trouve aussi beaucoup ce qu’on y apporte. Les stagiaires apportent tout autant à la forme et au fond de la formation que les formateurs. De part leur vécu, leurs attentes, leurs personnalité. C’est la diversité des individus et leur réunion qui apportent la richesse d’une formation.

2. Quelque soit l’étape (base, appro, perf) de votre session de formation à venir, ce n’est qu’une étape de la formation. De plus, et c’est fait pour, le/les stages pratiques et/ou d’approfondissement sont tout autant des moyens et des étapes de formation. On n’apprend pas tout en stage BAFA base. On a pas tout apprit du rôle de dirlo, quand on a finit ses formation BAFD… On a pas du tout fait le tour de la richesse de ces fonctions une fois qu’on est diplômé.
L’animateur diplômé a encore 1001 chose à découvrir, tester, apprendre à chacune de ses expériences. Tout-un-chacun à non seulement la possibilité, mais je suis convaincu l’envie, de progresser et d’apprendre à chacune de ses nouvelles expériences. De plus chaque individu autour de nous peut et participe à cet enrichissement des autres, quels que soient ses compétences et son expérience. La formation BAFA et BAFD ne sont que les toutes premières étapes de cette formation… Si elles donnent au formé le goût de la découverte, l’envie de se former et de partager, la conviction qu’il peut apprendre des autres et apprendre aux autres, et qu’on en a jamais fini d’apprendre et de progresser, alors c’est que la session de formation a été un succès pour les formés.


Et pour les valeurs alors?

Elles viendront tout doucement par la suite, avec les expériences, les rencontre, la réflexion.
Chacun a ses propres phases de développement et d’engagement.
Un moment arrive où on cherche tous à donner du sens, des valeurs à ce que l’on fait.
L’âge de la quête de sens arrive d’ailleurs souvent au même moment que l’âge de virer « vieux con »… méfiance donc.

Formation Bafa: Internat ou externat?

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J’ai passé toutes mes formations BAFA et BAFD (base, appro…) en « Internat ». C’est à dire que nous passions 24h/24 ensemble: stagiaires, formateurs. Je me souviens qu’au petit déjeuner, nous partagions ce temps de vie ensemble. Il n’y avait pas de self où chacun porte son plateau et sa petite portion individuelle de cacao, confiture, beurre ou autre. Nous nous faisions passer le pichet de jus d’orange, le thermos de café, le saladier de céréales et que sais-je d’autre. A la fin de petit déj, nous débarrassions ensemble non seulement nos ustensiles, mais aussi l’ensemble des ingrédients, et tout-un-chacun participait à la tâche: qui de passer l’éponge, qui de rapporter le gastro de bols sales à la plonge etc…

Après un retour rapide à la chambrée collective, qui ressemblait beaucoup à une chambre de colo de grand ados, le brossage des dents à trois autour d’un lavabo, ou dans les sanitaires « collectifs », ou une bonne demi-douzaine de stagiaires se brossaient en coeur et en rang d’oignon les dents… parfois même devant un miroir trop bas, car nous occupions un centre de vacances aménagé à hauteur d’enfant. On se pressait pour le rassemblement dans la salle collective où des chaises en rond nous attendaient… On aurait dit une colo, sans enfants où les jeunes adultes jouaient à la fois à la colo, aux monos et aux enfants.

Comme nous vivions tous ensemble sur place, les ateliers de formation débutaient tout de go après le petit déjeuner plus ou moins échelonné. Comme en colo, la pause café-clope en plus. Nous n’arrivions pas échelonnés, chacun par notre bus, métro ou trajet en vélo.

La matinée de formation ressemblait surement à la votre: des jeux, des chants, dedans, dehors, avec un ballon, des foulards, dans l’herbe, sous les arbres… On apprenait tout autant les jeux et les animations que la gestion d’un groupe, d’une activité, de son rythme et son déroulé, que le vivre ensemble… Ce que j’aimais, c’était d’apprendre en faisant: Des jeux? On jouait. Des chants? On chantait. On jouait autant le rôle des enfants, que des animateurs. Je ne me souvient finalement pas de moments assis à écouter, passif… Je ne me rappelle que de certains temps de recherche en petits groupes, dans la doc qui inondait des tables entières…  où l’infini des possibilités de jeux, de veillées, de cahiers d’animation, de réflexion, de législation, m’ouvrait des horizons inconnus et passionnants.

Si l’après midi passait tout aussi vite que la matinée, le déjeuner et le dîner étaient tout autant des moments joyeux que de formation active. Nous mangions tous ensemble, non pas avec un plateau, mais au plat. De qui veut de l’entrée passe son assiette, de qui se lève pour remplir à nouveau le pichet à la fontaine. « Fait donc passer l’assiette de celui en bout de table ! » « Quelqu’un sait comment faire marcher la trancheuse à pain? »
Avant le dessert, passaient les assiettes, de voisins en voisins, jusqu’à un bout de table, les couverts transitaient de la sorte. Parfois un charriot de desserte, mais souvent, l’un portait la pile d’assiette à la plonge, un autre se saisissait des couverts.

A la fin du repas, tout le monde s’agitait pour faire table rase, quand les derniers passaient un coup d’éponge pour faire disparaitre les dernières traces de notre passage. Je n’ai pas le souvenir de repas avalés sur le pouce, ni d’être pressé par le temps. Les repas permettaient les échanges et les discussions, sur des sujets connexes à la formation, mais aussi nos expériences passées, nos colos en tant que môme, nos projets pour la suite, mais aussi à raconter nos vies, et surtout à sourire, rire et prendre du plaisir. Bref à apprendre à vivre ensemble.

Le soir, le temps de veillée ressemblait souvent à une veillée de colo, puisque nous apprenions encore par le jeu. Quand ce n’était pas nous qui avions préparé des animations, en petits groupes, pour animer le reste des « stagiaires ». On apprenait à animer, en jouant, mais aussi en organisant, prévoyant et animant à tour de rôle les autres: Déguisements, Sensibilisation, Imaginaire, Décoration de la salle, Draps, Lumière, Musique, Courbe d’animation, Retour au calme… On ne faisait pas qu’en parler, on le faisait en vrai, on les vivait.
Le soir venu, très souvent le temps de formation « formel » terminé, nous passions pour la plupart encore du temps à discuter, échanger, lire, noter, voire jouer… juste pour le plaisir.

Évidemment nous partagions à plusieurs des chambres sur place. Ceux qui avaient vécu les colos en tant qu’enfant ou ados, ceux qui avaient déjà expérimenté la vie collective prenaient soin de prendre leur douche en début de soirée, ou le lendemain matin quand les autres étaient réveillés. D’autres au contraire, rentraient se coucher très tard, bien que les autres de la chambrée dormaient déjà, ils allumaient la lumière, cherchaient quelques affaires dans leur sac, faisaient chouiner la porte des WC, tiraient la chasse d’eau, voire même prenaient une douche. Ce qui ne manquait pas de perturber le sommeil des premiers.
Mais nous étions là pour vivre, expérimenter, apprendre tout autant les ficelles de l’animation que celles du « Vivre Ensemble » ou de la « Vie en Collectivité ». Par ailleurs, un temps formel était dédié à ce sujet. En cercle comme toujours, c’était le moment de pointer du doigt les « dysfonctionnements », « les petits soucis »… mais surtout les astuces ou les techniques, voire tout simplement les comportements facilitant la vie ensemble: quand prendre sa douche, comment aller se coucher sans gêner les autres, la répartition des tâches à la fin du repas, etc…
Après quelques jours nous avions tous prit le plie de la vie collective, les dysfonctionnements et les « mauvais comportements » laissaient la place à la vie collective…

Mais aussi à la fatigue. Cette bonne fatigue que l’on éprouve en colo, à force d’être au top du matin au soir, en plus du coucher tard, voire trop tard, parce qu’on a préféré discuter encore des heures plutôt que d’aller se coucher. Nous apprenions aussi à cette occasion que nous n’étions pas des machines, que certains matins piquaient plus que d’autres, qu’au fil des jours à ce rythme « poussé », notre énergie, notre humour, notre joie, notre concentration et surtout notre seuil de tolérance évoluaient à la baisse. En quelques jours, la vie collective qui nous semblait si idyllique, commençait pour certains à les irriter, à les agacer, voire dans certains cas, à conduire à des conflits. Par chance nous expérimentions cela entre (jeunes) adultes, sans la présence d’enfant. La clairvoyance des plus reposés, comme l’expérience des formateurs (enchantés de la naissance de ces « cas »), nous ont permit de pointer du doigt l’impact sur nos sensibilités et nos capacités de la fatigue. Que notre irritabilité naissait non pas des autres, mais de notre propre fatigue. Les conflits permettaient aussi d’apprendre à les analyser et d’apprendre à les régler.

A ce rythme, avec cette démarche, avec cette densité et cette intensité, une formation d’une semaine nous paraissait être d’une richesse incroyable. Nous en avions apprit sur l’animation, sur les autres, et sur nous bien plus qu’en une semaine normale. Nous en sortions transformés. Marqués par cette semaine passée ensemble.

Si je vous raconte cela, ce n’est pas pour vous rapporter des nouvelles du front. Beaucoup ont vécu ou vivent à quelques variations près ce que je raconte de mes souvenirs de formation.

Si je vous raconte cela, c’est que depuis 2-3 ans, j’ai prit le temps de moins diriger de colos (je ne faisais que ça, à toutes les vacances, non stop, depuis 5 ans, en plus de la coordination et l’animation de classes de découverte). Depuis 3 ans, je passais mes vacances d’été, en colo, mais avec un peu de recul: comme intervenant. Je vivais sur la colo, j’étais avec les enfants, mais je n’avais plus la responsabilité de la direction, ni des animateurs. Ce qui m’a permis de regarder les colos d’un peu plus haut, que la tête dans le guidon.

J’ai été surpris de voir de jeunes animateurs (pléonasme), mangeant à une table sans enfant, quitter la table sans débarrasser celle-ci, ni les plats, ni leurs couverts, ni passer un coup d’éponge. J’ai observé des animateurs assis à une tablée d’enfants, ne pas « animer » le repas: conseiller, aider à s’organiser… « Qui sert les légumes? », « Passez l’assiette de vos voisins par ici », « Qui veut aller re-remplir le pichet à la fontaine? », « Et si on faisait une pile d’assiettes ». J’ai découvert des animateurs totalement « passifs » durant les temps de repas, se jetant presque autant que les enfants sur le plateau de 8 steaks, à qui aura le premier, sachant qu’il y avait autant de steak dans le plat que de convives à la table. J’ai observé des jeunes adultes, qui n’intervenait pas non plus au moment du repas, si un verre se renversait, se brisait, si des enfants se disputaient, pour un bout de steak ou pour le plat… J’ai même entendu un jour un animateur répondre à la demande de son collègue lui disant « tu pourrais m’aider pour le plat des « sans viandes »? »…  un laconique « bin, mais je mange là… »

J’étais un peu décontenancé. Au premier abord, j’ai eut la réaction bête « haa ces Jeunes »… « A mon époque… blablabla »… et puis je me suis dit que je commençais vraiment à avoir des phrases de vieux con.

J’étais également inquiété par le fait de voir des jeunes animateurs complétement exténués après quelques jours de colos: cernes et yeux marqués, sans énergie, ne survivant que par intraveineuses de café, irritables, voire en conflit avec leurs collègues, les enfants etc… certains craquant nerveusement, en larmes dans un coin de la colo, d’autres, en col roulé, sinusite, rhinite, laryngite en plein mois de juillet durant la canicule. Tout ceux-ci, mis à part quelques exceptions près, niaient énergiquement d’être fatigués, dans le déni total des symptômes physiques et psychologiques évident liés à la fatigue. Aucun n’associait ni leur irritabilité ni leur apathie à cette cause.

Là où j’ai vraiment senti que je devenais un vieux con, c’est quand j’ai tenté de passer quelques conseils, pour simplement dédramatiser et démystifier leur état.

« Non, non, on est pas fatigué » insistait encore l’animateur, cerné, sinusité, hyper-caféiné…

Je virais au « vieux con attitude » finalement bien plus dans leur regard que dans mes pensées ou mes propos. Quelle belle idée j’avais de leur donner des conseils, leur expliquer ou démystifier ces quelques astuces/situations « classiques » de la vie collective.
Si l’orgueil évident guidaient leurs réactions, c’était surtout une nouveauté, une méconnaissance, un ignorance de ces situations/cas classiques de vie collective : du coucher tard, au coup d’éponge évident sur la table…

Il aurait été facile pour moi de penser: « décidément les (jeunes) animateurs ne sont plus ce qu’ils sont », ou « bon, il y a un gap de génération évident », ou « on ne leur apprend plus rien en formation ».
J’ai commencé à tilter, le jour où un animateur, me voyant passer par là, m’a appelé à l’aide le soir du barbecue:
« Loïc, on a besoin de toi, tu sais faire cuire les saucisses on y arrive pas! »

Devant l’animateur peinant à retirer avec les doigts les saucisses des flammes ardentes du bucher, je découvrais un gastro de saucisses en attente de cuire, un second remplit de chippo noires, carbonisées…. 30 enfants dont l’estomac crillait famine face à une grille unique de 40cm sur 20cm pour seul point de cuisson, posée en équilibre instable au milieu du brasier.
Après avoir réuni des pierres pour encercler le foyer, sur-élever la grille minuscule, collecté deux autres plaques grillagées, une grande pince et un pic à saucisse, j’ai enseigné l’art de la grillade à la braise et non pas la carbonisation à la flamme vive de buches de noel de la taille d’un tronc d’arbre. C’est à ce moment là que j’ai prit conscience d’une première chose quand j’ai lancé naïvement un : « Voilà, là tu vas voir, ça va être plus simple! Tu n’avais jamais fait un babeuc avant? »

« Bin non »... a répondu l’anim

« Mais même pas un feu de camp? En colo, comme même ou comme anim?… ou même avec des potes pour des chamalow ou un WE pour un barbeuc? »

« bin… heu non »…

J’aurais pu tomber dans la « vieux con attitude » directe face à ce jeune animateur, dont le smartphone dépassait de la poche arrière, pour une fois qu’il n’était pas dans sa main… Mais c’est une petite peine au coeur qui m’a prit à ce moment là. J’avais vécu tant de feux de camps et de grillades sauvages, enfant, en colo, mais aussi avec les autres gamins de mon age, puis avec les potes, puis en colo comme anim… lui non. Je me suis dit à ce moment là, qu’il était passé à coté de tout ces instants « supers sympa »… des chamalows grillés qui collent aux dents, au pull.. et aux cheveux du voisin.

Ma deuxième et fondamentale prise de conscience fut quand je prit le temps de discuter avec ces jeunes anims de leur formation bafa: « avec quel organisme », « où », « en internat ou externat ». Et là, pour la première fois, j’ai découvert qu’un nombre important, pas 1/4… non, presque la moitié des anims avait fait leur formation BAFA en externat.

En externat ?

A mon époque (phrase de vieux con… attention dans l’animation on est très vite un vieux con hein…. après 2 étés tu es estampillé « expérimenté », alors je te raconte pas quand ça fait 15 ans que tu fais de l’animation, là t’es un Gros Vieux Con, non seulement les anims te vouvoient pendans 3 jours avant d’arriver à arrêter, mais en plus dès que tu dis quelque chose « c’est une phrase de vieux con »), … A mon époque donc dans le « catalogue » des sessions de formation sur la saison, pour une région, il devait y avoir 1 ou 2 session en externant… tout au plus… uniquement dans les grandes villes. A mon époque donc… les formations étaient en internat, en continue. Pour ma part, et pour nombreux dans mon cas, l’internat était la normalité… Bin oui, comment apprendre la vie collective, les veillées, les repas, si on ne passe pas ces moment là ensemble??? Si on ne les vie pas???

A mon époque, et dans mon cas, je me souviens même avoir passé:
* la base bafa, dans ma région, mais pas dans mon département
* mon perf/appro bafa, dans ma région et dans mon département
* mon base BAFD, la dans région voisine
* mon perf/appro BAFD, dans une région à perpette-les-oies

C’était « normal », puisqu’on voulait apprendre à vivre ensemble, en collectivité, pour nos futurs colos. Perso je voulais aussi voir du pays, de nouvelles régions, rencontrer des gens d’ailleurs avec qui je partageais les mêmes envies, les mêmes passion pour l’animation et les mêmes valeurs.

Rentrer tous les soirs chez mes parents à la fin de la formation?
Plutôt mourir !!!

Manger « en ville » le midi entre midi et deux, entre la fin de la matinée et la reprise l’aprem…. et puis quoi? Pourquoi pas manger un Kebab tant qu’on y est?…

C’est à ce moment là, face au grand nombre d’animateur formé sur des sessions en externat que j’ai réalisé qu’on ne peut pas avoir apprit à vivre ensemble si on ne l’a pas vécu. Que les comportements et les réflexes de la vie collectives qu’ils n’avaient pas, ils ne les avaient pas vécu eux. Ni pour certains en colo, ni pour beaucoup en formation.

Alors j’ai allumé mon PC et j’ai tapé « formation BAFA ». J’ai regardé. Et bien oui! Les formations en « externat » se sont multipliées comme des petits pains. Ha bah j’étais sur le cul à ce moment là. Je ne savais pas.

Je comprends pourquoi: le coup de la semaine de formation est moindre, puisqu’on ne compte plus l’hébergement et les repas… Certains sont en demi pension… du coup, j’imagine que le self service, où on mange sur un plateau s’est également standardisé…. (je vois de plus en plus de colo avec ce type de restauration…. je ne donnerais pas mon point de vue, je ne veux pas passer plus pour un vieux con que je ne le suis déjà)

Alors oui, je comprends finalement les (jeunes) animateurs: la formation BAFA a un coût, peu trouvent un financement pour. Moi mon argent de poche partait dans mes formations, mais c’était pour moi ma joie et tout à la fois mes vacances (ouais! on retrouve l’ambiance des colos, alors qu’on est grand!!)

Du coup j’ai parlé aux anims que je croisais autour de moi, mais aussi aux jeunes (grands) ados qui voulaient passer le BAFA:
En internat ou externat?… et bien, je pense que le nombre de formés en externat va aller croissant mes chers « amis animateurs/directeurs vieux cons »…

* Parce que ça coûte moins cher,
* Parce que pas mal d’anim ne font plus du tout de colo, mais du CLSH, et du péri-scolaire… et donc que la vie collective bin, c’est pas important dans ces types d’animation (ça n’existe pas)
* Parce que pas mal d’anim et d’ados ça les fait pas chier de rentrer le soir chez leurs « darons » ou de manger un Kebab en ville entre midi et deux… voire même non seulement ça les fait pas chier mais ils « kiffent » le truc
* Parce que prendre la formation la plus proche de chez eux, c’est une évidence, aller dans le département d’à coté c’est le bout du monde, alors je te parle pas d’un autre coin de la France: le sac à dos, le train… « pfff relou »
*Parce que peut importe l’organisme de formation en fait, tant que c’est pas loin, que ça coûte pas cher…

Donc j’ai comprit plein de truc ces derniers été, en ayant le temps de prendre du recul sur les colos, en les regardant d’un peu plus loin et en discutant avec les anims, pour tenter (en vain) de ne pas passer pour un vieux con, et pour tenter de comprendre les évolutions, leur évolution.

Le nombre de formations en internant diminue au profit des formations en externat. Donc le vécu et l’apprentissage de la vie en collectivité, du vivre ensemble, et du rôle de l’adulte envers les enfants dans cet apprentissage va évoluer aussi.

Je comprends dans un sens cette évolution et les choix des organismes de formation… je comprends un peu mieux aussi les jeunes (anims ou ados) dans leurs décisions et dans ce qu’ils sont.

Là où je suis encore un peu un vieux con, ce n’est donc plus sur « Internat » vs « Externat », quand bien même j’ai une position bien tranchée à ce sujet…. Là où je me sens un vieux con et ce sur quoi il va falloir que je discute encore un peu plus avec des gens, des anims, des jeunes, c’est sur le choix (ou l’absence de réel choix en fait) des anims quant à leur organisme de formation. Comme si tous les organismes de formation faisaient la même chose, de la même façon, pour les mêmes valeurs et dans les mêmes buts.

Mais ça du coup, ça sera pour un prochain article.

A bientôt !
(Vieux cons et jeunes cons, selon le point de vue… des autres)